MON COMBAT, MON OURAGAN.

Il n’y a pas un jour qui passe sans que je ne reçoive un message en privé qui n’évoque le sujet alors aujourd’hui je lève le voile et je choisis de vous livrer mon histoire, mon combat dans les plus intimes détails. Comme 2 à 4 millions de femmes en France et 180 millions à travers le monde, je suis atteinte d’une maladie incurable, exclusivement féminine (puisque liée aux règles). Comme les autres malades j’ai du attendre plusieurs années avant que mes douleurs soient enfin prises au sérieux. Lorsqu’enfin un diagnostic à mis un nom sur ce mal, ce fut un soulagement. Je n’étais pas douillette. J’étais simplement malade. 

« Vous avez une endométriose profonde. »

Vous avez, vous avez, mais j’ai rien commandé, il est bien gentil lui. Une Endométriose ? Inconnue au bataillon. Qui c’est celle là ? Pas prévue au programme. Pas même invitée. Qu’est-ce qu’elle vient faire ici ? Elle est toute seule ou c’est une bande organisée ?

L’ENDO QUOI ?

Ce nom barbare, peu connu, qu’on comprend à moitié. Le truc que t’entend une ou deux fois à la télé mais sur lequel tu prends pas vraiment le temps de t’arrêter (parce-que non concernée). Je vais tenter d’être simple et claire dans mes mots afin que vous puissiez comprendre techniquement ce qui se passe là-dedans. C’est comme une coloc que t’as pas choisi. (Et comme dans chaque coloc, tu aimes aussi passer un peu du temps sans elle tu vois.)

Médicalement, l’endométriose est caractérisée par la présence des cellules de l’endomètre en dehors de l’utérus. L’endomètre désigne les cellules qui tapissent la paroi interne de l’utérus. Elles se développent lors du cycle menstruel pour accueillir un embryon en cas de fécondation. (Jusque là, ça va ?) S’il n’y a pas fécondation (si t’es pas enceinte en somme) ces cellules seront éliminées par le vagin : ce sont les règles. Lors des règles chez toutes les femmes, les cellules de l’endomètre remontent aussi à travers les trompes et se propagent à l’extérieur de l’utérus et le système immunitaire les détruit. Mais chez certaines femmes (pour des raisons à ce jour encore inconnues) ce n’est pas le cas et ces cellules se greffent sur des régions où elles ne devraient pas se trouver. A chaque cycle elles s’épaississent et saignent. Ne pouvant être évacués par le vagin, ces saignements dans d’autres endroits du corps s’accumulent créent des kystes, des lésions ou des adhérences. C’est ça l’endométriose. 

MON DIAGNOSTIC

Avant de vous décrire en détail mon parcours, sachez que les malades attendent entre 7 à 10 ans avant qu’un diagnostic soit posé. La croix et la bannière. Pourquoi est-ce si long ? Eh bien laissez-moi d’abord vous dire une chose : parce-que la douleur, notre douleur, n’est pas pleinement entendue. On occulte la notion du mal chez la femme pendant les règles, elle n’est pas comprise, donc nous finissons souvent par considérer que c’est normal (et les femmes atteintes ne consultent pas suffisamment tôt.) J’ajouterais aussi sans aucun jugement qu’il y a une méconnaissance du corps médical (qui tend à s’amoindrir fort heureusement les années passant) Malheureusement, la plupart des médecins ne savent pas et n’ont aucune idée de la complexité, des tenants aboutissants de la maladie car ça ne leur est pas ou peu enseigné. 

Pour ma part, après avoir rencontré sur Toulouse de multiples gynécologues, après avoir passé des tonnes d’IRM avec injections, échographie et tutti quanti, le verdict des pseudo professionnels restait le même : « il y a deux trois tâches mais sûrement des saignements normaux, vous n’avez rien, c’est le stress, dans la tête, apaisez-vous. » APAISEZ-VOUS. Oui, ce sont des mots qu’on a prononcé pour qualifier ce mal qui me détruisait.

Apprivoisant ces douleurs et connaissant mon corps qui souffrait, je savais que la normalité n’était pas de mise ici. Je subissais. Ce n’était pas mon cerveau. C’était ma chair. « Grâce » à ma sœur à qui on a découvert la maladie tardivement, moi, j’ai finalement été prise à temps. L’hôpital Cochin m’a d’ailleurs contactée pour participer à l’étude spécifique pour la recherche avec le prélèvement salivaire d’un potentiel lien entre endométriose et antécédents familiaux (dont les résultats tomberont fin 2021.)

J’ai evidemment accepté. Nous savons par plusieurs études que si vous êtes atteintes d’endométriose le risque que votre sœur ou vous parents proches de sexe féminin l’aient également est plus élevé que pour la moyenne de la population. Et les médecins parlent d’une augmentation du risque par un facteur de 5 à 7 (en non crypté ça veut dire qu’une fille dont la mère est atteinte aurait entre 50 à 70% de développer l’endométriose au lieu des 10% habituel. La part de la génétique est donc indéniable.) 

MES TRAITEMENTS

C’est à Paris que j’ai choisi d’être traitée dans un premier temps car j’y vivais. J’ai fais confiance au Docteur Petit, à l’Hôpital Saint Joseph et au Docteur Sauvanet. Je me souviens encore du premier rendez-vous. Mr Petit avec sa moustache, l’échographe au bout des doigts « Comment ont-il pu vous faire autant d’échographies sans même penser à l’écho endo-vaginale, c’est un moyen efficace de diagnostiquer l’endométriose, allez hop, sur la table la Toulousaine ! » (Là Il appuie, et t’as envie de le tuer mais tu peux pas. Parce-que son job c’est d’aller localiser ce qui te fait souffrir et de t’expliquer pourquoi.)

Bilan : 23 ans, endométriose profonde Stade 2, paroi de la vessie, ligament utéro sacré touchés. Petit kyste sur l’ovaire gauche. Adhérences partout. Et des pleurs par centaines quand on t’explique qu’il faut te préserver pour ne pas frôler plus tard l’infertilité. Lorsqu’un nom est enfin posé sur la maladie, c’est le parcours du combattant qui débute. Croyez-moi. Entre soulagement et saut à l’élastique. Un fossé quoi.

Suite à cette appréciation, pour tenter de supprimer mes symptômes deux types de thérapies m’ont été proposés : 

  • le déclenchement d’une ménopause artificielle ou la prise d’une pilule en continu qui permet de stopper mes règles (l’absence de règles est censée entrainer l’arrêt de douleurs. Ce traitement empêche toutefois une grossesse et peut avoir des effets secondaires importants) 
  • la chirurgie, l’intervention consiste à tout retirer mais n’empêche pas la récidive, quasi inévitable.

Vous l’aurez compris, à ce stade, deux solutions s’offraient à moi. À l’époque, j’ai choisi la première option (la peur de passer sur le billard sûrement). Le traitement fut terrible. Bouffées de chaleurs, +12 kilos, sautes d’humeurs, dépression… Quand on suit des traitements hormonaux assez lourds, ce sont les hormones qui parlent. L’agressivité était présente. J’ai vu jouer un dédoublement de personnalité où je ne contrôlais plus rien et où je me détestais. 

Une année plus tard, j’optais pour l’opération. Ils ont tout ouvert, ils ont tout nettoyé. Ablation du ligament utéro sacré. Célioscopie exploratrice. De l’extérieur c’était infime, quand ils ont ouvert c’était Beyrouth. Mais il faut savoir que dans mon cas les effets des opérations sont éphémères car, si vous suivez bien, à chaque nouveau cycle cela revient, donc, la maladie prolifère. Le chat qui se mord la queue. La seule solution serait de ne plus avoir de règles pour y entrevoir éventuellement une accalmie (Autant te dire qu’à bientôt 28 ans, hors de question d’envisager l’avenir sans enfants ou la pilule en continu qui te bourre d’hormones !) À ce jour, j’ai refusé tous les traitements à part les opérations.

MES SYMPTÔMES & CONSÉQUENCES

Rare sont les médecins, mêmes gynécologues, qui se sont spécialisés dans la maladie. Il m’aura fallu plusieurs années pour trouver le/s bon(s). Ma rencontre avec le Professeur Pierre Leguevaque à Toulouse a mis fin a une longue errance médicale. Désormais, c’est lui qui me suit comme ma soeur. Un Professeur bourré d’humanité, qui considère la femme dans tout son être. Il fait partie de ceux qui respectent chaque décision. Après l’avoir conseillé à plusieurs d’entre vous via nos échanges instagram, je suis si heureuse de lire ce type de témoignages. 

Avec l’endométriose, au-delà des douleurs, plane aussi le spectre terrible de l’infertilité. Et il faut en parler. Avec tact et bienveillance. Je mets l’accent là dessus car certains médecins ne se rendent pas compte de ce qu’ils te disent, c’est parfois très violent. Ils te mettent la pression « Le temps est compté, parce-que vous comprenez à bientôt 30 ans le pic est là, vous devriez faire un bébé… » « Ah ok donc si je suis ton raisonnement il faut faire un gosse vite là pas parce-que j’en ai envie mais juste parce-que peut-être dans deux ans je pourrais plus en avoir ?! » Vous imaginez bien que pour moi qui aime bien déjà les trucs un peu magiques et spontanés (et qui suis surtout très indépendante) ça me fait un peu flipper. 

Côté symptômes, d’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu des règles très douloureuses et très abondantes. Vers 16 – 17 ans, mes absences au lycée de plus en plus régulières devenaient inquiétantes. Je n’étais pas comédienne, ni douillette, j’étais souffrante. Les gens me disaient « tu te plains tout le temps, t’as toujours mal, non mais regardez moi cette chochotte ». Mais mes parents ont été présents et m’ont fait confiance, m’ont écoutée. Cette douleur grandissait de plus en plus, chaque jour. Des coups de couteau, des coups de clous. Une fatigue extrême. En éternuant, j’avais l’impression que quelque chose s’arrachait dans mon ventre. 

En gros, l’endo, tu la sens arriver. C’est une énorme pression, une tension, t’as un peu mal au ventre et puis tu commences à être épuisée, c’est de plus en plus difficile, douloureux, la sensation est indescriptible, personne ne comprend autour de toi car t’es seule à le vivre. Ça pousse vers le bas, ça brûle mais c’est glacé, t’es clouée au lit, t’es pliée en deux, t’annules tes rendez-vous, t’es complètement fracassée. Je peux pas vraiment vous expliquer en tapant des mots sur un clavier, c’est comme si tu avais déménagé 10 fois en 2 heures, t’as mal au rein, t’as envie de dormir mais tu ne peux pas, tu avales des médocs plus forts les uns que les autres, ton transit est bousillé… et elle repart en te laissant dévastée (donc en vrai, ça te prend deux semaines cette histoire sur un cycle)

D’un point de vue plus technique, voici ce que je subis comme des milliers d’autres femmes :

  • des épisodes de fatigue chronique
  • la survenue de nausées, de vomissements, de vertiges et de malaises vagaux
  • des douleurs abdominales basses et des saignements génitaux,
  • des douleurs lors des rapports sexuels (dyspareunie),
  • des douleurs avant et pendant les règles qui peuvent être hémorragiques,
  • des troubles digestifs et urinaires (diarrhées, constipation)

Les conséquences et les répercussions sur la vie professionnelle et la vie amoureuse sont également incommensurables. A ce jour, j’ai créé ma société, je suis indépendante et je n’ai donc pas de mal à gérer la prise d’anti douleurs avec les phases difficiles et le travail. Je pose quelques jours de congés, j’informe mes clients de mon absence et j’essaie de m’adapter à elle. Je mesure la chance que j’ai de ne pas être employée, je connais deux personnes qui ont été licenciée car elles manquaient le travail à cause de la maladie, ces absences étant extrêmement mal perçues par la Direction… Ca aussi, c’est une réalité.

MES SOLUTIONS & L’APRÈS

Pour rappel : Il n’existe – malheureusement – aujourd’hui encore au monde AUCUN TRAITEMENT permettant de guérir définitivement l’endométriose.

Malgré les traitements hormonaux et chirurgicaux, les douleurs ont persisté. J’ai donc choisi de chercher de nouvelles solutions que je découvre petit à petit. Certaines ont déjà été mises en place, d’autres sont en cours. Car pour des effets, il faut qu’elles soient nombreuses. L’ostéopathie avec Mr Travostino à Muret, Le Reiki avec Lucile de Chakaluna, le yoga avec Morgane du Singe, le sport avec Coralie de GalleryC (qui est extrêmement important pour relancer la dynamique corporelle) et puis l’axe de l’acupuncture, la mésothérapie… Le bon traitement celui que je cherche, est celui qui ne me donnera AUCUN effet indésirable, tout simplement.

Je me suis renseignée à tout va sur les approches plus naturelles pour atténuer les douleurs. Le plus rude pour moi reste encore l’approche alimentaire. Le Régime Anti Inflammatoire s’avère à priori extrêmement efficace. De nombreuses femmes, suite à la suppression de certains aliments se sont aperçues que leurs douleurs se faisaient de moins en moins sentir. Mais alors autant te dire que quand t’as été élevée au bol de lait avec céréales, à la tranche de viande rouge de chez le boucher & au saucisson de mamie… ce n’est pas une mince affaire. Un combat dans un combat. (Inception le truc)

Prochainement, j’espère réussir à me créer une hygiène de vie irréprochable, qui passera par l’alimentation. Dans les périodes de douleur, voici une liste des aliments à fuir (en l’écrivant je pleure du vin blanc)

  • Bannir la viande rouge, la charcuterie.
  • Arrêter le gluten
  • Bannir le sucre (en achetant de la farine complète donc gâteaux, pâtes demi-complets, pains complets.
  • Bannir les plats transformés car trop de sels, d’additifs et de plastique.
  • Éviter le lait de vache et préférer de manière limitée le lait de brebis, chèvre.
  • Éviter l’alcool
  • Bannir le soja
  • Avoir quelques journées sans laitages et/ou gluten particulièrement lors des règles

« Accepter le Diagnostic, Déjouer le pronostic. »

J’ai eu envie de partager cette expérience aujourd’hui avec vous parce qu’il faut savoir que rien n’est figé et que ça n’arrive pas qu’aux autres. Dans cet article, toutes les facettes de mon endo ont été abordées, c’est un choix de transparence que j’ai fais. Alors c’est vrai que socialement, professionnellement, tout se complique quand il s’agit de communiquer autour de l’endo (quand nous même nous n’avons pas les réponses). Peu de personnes sont à même de comprendre au regard de la complexité de la maladie… «  T’es malade mais pourquoi ? » Et bien, je ne sais pas, belle question. Le fait qu’il n’y ait pas de cause réellement définie n’aide pas. Et on n’en guérit pas non plus. Ça fait tellement de choses avec des points d’interrogations pour les gens qui ne connaissent pas, c’est nébuleux…

Alors oui, pour vous, l’endo restera peut-être un grand mystère mais moi j’ai toujours cru que j’étais seule et finalement on est plus de 4 millions dans la même équipe et ça, ça change tout. Merci.

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